LA CHALEUR …LA DESCENTE DANS L’ÉTÉ ADOLESCENT ADAPTÉE PAR MURIEL BRUNIER

la chaleur -zenitudeprofondelemag.com

« Oscar est mort parce que je l’ai regardé mourir, sans bouger. »

Il est de ces œuvres qui ne se racontent pas seulement : elles se ressentent.

La Chaleur, adaptation scénique du roman de Victor Jestin (Prix Femina des Lycéens 2019), en fait partie. Une pièce où la lumière écrasante du soleil devient une clarté implacable sur les tourments d’un adolescent à la dérive. Une pièce qui ne vous quitte pas, même après les saluts.

D’emblée, l’histoire nous saisit à la gorge.

Léonard, 17 ans, voit un autre adolescent mourir étranglé par une balançoire… et ne fait rien.

Un acte d’immobilité tragique, un geste d’inaction aussi brutal qu’un crime.

Dans la panique, il enterre le corps sur la plage. Le lendemain, alors que tout pourrait s’effondrer, il rencontre une fille. Et la vie, cruellement, continue.

Un texte profond

La Chaleur, c’est le récit d’un été brûlant dans un camping des Landes, saturé d’odeurs, de cris, de fêtes, de silences étouffés. Un monde adolescent où Léonard ne trouve pas sa place, ne sait pas jouer le jeu social du plaisir estival, ni même celui de la séduction. Un monde où sa passivité devient rébellion. Mais une rébellion intérieure, muette, presque invisible.

Une mise en scène entre cinéma et théâtre

Muriel Brunier, scénariste et réalisatrice, fait ici ses premiers pas en tant qu’adaptatrice et metteure en scène théâtrale. Et ce passage s’accomplit avec une intensité rare. Marquée par sa propre histoire méditerranéenne, par la lumière brûlante et les tensions émotionnelles de ses personnages, elle a immédiatement été happée par la prose de Victor Jestin : « Le roman embrasse une légèreté et un réalisme qui m’ont interpellée… Dès les premiers mots j’ai été en empathie immédiate avec Léonard. »

La Chaleur - manufacture des abbesses
La Chaleur – crédits photos Flavie Maintier

Muriel Brunier aborde cette adaptation avec un regard profondément sensoriel. La chaleur n’est pas un décor : c’est un personnage à part entière. Le sable, la sueur, le sel, les battements du cœur deviennent palpables sur scène. La lumière, le son, le rythme de la narration : tout concourt à créer un vertige émotionnel, un huis clos en plein air.

C’est un théâtre habité d’images : sa mise en scène, influencée par sa pratique du cinéma, joue sur les ruptures de rythme, les ellipses, les superpositions temporelles. On glisse entre les souvenirs, les sensations, les regrets, dans une scénographie pensée comme un long travelling intérieur.

Léonard, un héros ordinaire

la chaleur

Léonard n’est pas un monstre. Il est cet adolescent pris dans une société qui exige trop, trop vite. Dans une époque où le bonheur est une injonction permanente. Il est l’anti-héros par excellence : maladroit, opaque, traversé par des émotions qu’il ne comprend pas lui-même. Et c’est bien ce flou, cette humanité fragile, que la pièce embrasse avec pudeur.

Muriel Brunier refuse de juger… Elle préfère donner à voir, à ressentir, à écouter. Elle ne cherche pas à excuser, mais à comprendre. À nous faire comprendre. Et, surtout, à faire émerger une forme de poésie à partir de la douleur.

Un roman devenu théâtre, et bientôt un choc scénique

crédits photos Flavie Maintier

La Chaleur est bien plus qu’une adaptation. C’est une relecture inédite d’un roman intense. Une proposition artistique singulière, portée par une jeune équipe en quête de justesse et d’émotion.

Sur fond de drame adolescent, c’est un récit universel qui se joue : celui de la culpabilité, du désir, de la difficulté à grandir, à faire face.

Un théâtre viscéral, tactile, qui bouleverse et laisse une trace.

La Chaleur, c’est comme une brûlure à laquelle il est difficile de rester insensible.

INFOS PRATIQUES

LA CHALEUR

Adaptation et mise en scène : Muriel Brunier

d’après le roman de Victor Jestin (Prix Femina des Lycéens 2019)

publié aux Editions Flammarion

avec Arthur Beaudoire, Marie Cazor & Antoine Boizeau

Assistant mise en scène :  Louise Morin

Scénographie :  Maud Guyon & Jordan Vincent

Création lumière :  Frédéric Borja

Costumes :  Agathe Vangreveninge

Composition musicale :  Mathilde Ferry

Mixeur son : Florian Calmer

 

Nous avons eu la chance d’être invités à découvrir cette pièce à la Manufacture des Abbesses par Rachel Ruello que je remercie . Les représentations sont terminées depuis le 14 mai mais j’espère qu’il y en aura de nouvelles prochainement. 

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