Hier soir, j’ai assisté à une pièce de théâtre exceptionnelle à l’Espace Soprano de Vincennes : « KENNEDY : Des Hommes de Courage ».
Une claque. Une pépite. Un moment de théâtre comme on en vit rarement.
Une œuvre puissante, portée par deux comédiens bluffants, une mise en scène cinématographique d’une maîtrise rare, et un texte riche, intelligent, captivant. En bref : un coup de cœur absolu.
Une plongée vertigineuse dans les secrets d’État
Décembre 1969. Le capitaine Scott Dulles, tout juste revenu du Vietnam et marqué dans sa chair comme dans son âme, enterre son père avec qui il était en froid depuis huit ans. Mais alors qu’il pense tourner une page, sa rencontre avec un journaliste vieillissant, Taylor Smith, vient tout bouleverser. Celui-ci prétend détenir des révélations explosives sur l’assassinat de John Fitzgerald Kennedy, survenu six ans plus tôt. Très vite, le passé resurgit, et avec lui, le spectre d’un complot à grande échelle dont les ramifications nous entraînent jusqu’au cœur de la CIA.
La pièce est une fiction politique haletante, qui s’inspire de l’une des hypothèses les plus crédibles aujourd’hui : le rôle central qu’aurait joué Allen Dulles, directeur limogé de la CIA, dans le complot contre JFK.
Mais au-delà du fait historique, ce sont les hommes derrière les événements, leurs luttes intérieures, leurs silences, leurs actes de courage ou de trahison, que la pièce explore avec brio.
Deux comédiens, quatre personnages… et un tour de force
Sur scène, deux acteurs seulement : Nicolas Kaplyn et Pierre Azéma, qui incarnent à eux deux quatre personnages. Et le résultat est stupéfiant.
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Nicolas Kaplyn, également co-auteur, prête ses traits à Scott Dulles (le fils) et à Ethan Clarence (un jeune assistant de la CIA). Il navigue avec une aisance impressionnante entre la vulnérabilité d’un soldat en quête de vérité et la froide détermination d’un agent d’État.
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Pierre Azéma est tout aussi remarquable dans le rôle du journaliste Taylor Smith, usé mais tenace, et surtout dans celui d’Allen Dulles, stratège de l’ombre, glaçant, brillant, manipulateur.
Leurs changements de personnages se font à vue, parfois en une fraction de seconde, et c’est un bonheur de spectateur que de les voir passer d’un rôle à l’autre sans jamais perdre en intensité. Leur jeu est précis, habité, viscéral. On y croit de bout en bout.
Une mise en scène d’une intelligence rare
Pierre Huntzinger, à la mise en scène, signe un travail d’une redoutable efficacité.
La pièce alterne en permanence entre deux époques – avant l’assassinat de JFK, et après, en 1969 – et entre plusieurs lieux : le domicile d’Allen Dulles, celui du journaliste Taylor Smith, le bureau à la CIA, et quelques autres points-clés où se retrouvent ponctuellement les personnages.
Ce jeu temporel et géographique pourrait vite devenir confus. Pourtant, grâce à un dispositif scénique ingénieux (bibliothèque centrale modulable, projections, jeux de lumière, accessoires mobiles), la fluidité est totale. On se laisse porter par le rythme des scènes, comme si on regardait une série Netflix en live, avec des références assumées à House of Cards ou Mad Men.
La musique, elle aussi, joue un rôle fondamental : du rock des sixties (Rolling Stones) au jazz de Miles Davis, jusqu’au sublime « That’s Life » de Sinatra, elle structure les scènes, accompagne les émotions, et inscrit la pièce dans une ambiance très cinématographique.
Un théâtre exigeant… mais accessible.
Oui, il faut s’accrocher. La pièce demande une attention constante : les allers-retours dans le temps, les changements d’identité des personnages, les non-dits, les jeux de pouvoir… Tout s’entrelace avec complexité. Mais c’est précisément ce qui fait la richesse de cette œuvre. On sort du théâtre un peu sonné, mais intellectuellement nourri, émotionnellement secoué.
Et surtout, on en parle. Sur le trajet du retour, les questions fusent :
Et si c’était vraiment Allen Dulles, le grand marionnettiste ?
Pourquoi le courage dérange-t-il autant dans les hautes sphères?
Quels secrets sommes-nous prêts à porter pour notre pays, ou notre famille?
Une œuvre forte, politique, mais profondément humaine
« KENNEDY : Des Hommes de Courage » interroge autant les dérives du pouvoir que la loyauté, le sacrifice, et l’héritage familial.
C’est une pièce qui mêle histoire et fiction, grandeur politique et blessures personnelles, idéal et trahison.
Et surtout, c’est un bijou de théâtre, porté par une équipe de passionnés qui croient à ce qu’ils racontent et qui ont su transformer un sujet complexe en un moment de théâtre inoubliable.
Si vous aimez les thrillers politiques, les récits historiques fouillés, et surtout le théâtre qui vous prend aux tripes tout en stimulant vos neurones, foncez!
À ne pas manquer !
Un immense merci à l’attaché de presse Nadir Hammaoui qui nous a invités à découvrir cette magnifique pièce !
INFOS PRATIQUES
KENNEDY : DES HOMMES DE COURAGE
Et si la CIA était responsable d’un des plus grands drames de l’Histoire ?
De Nicolas KAPLYN, Elise ROPERT et Pierre HUNTZINGER
Mise en scène Pierre HUNTZINGER
Avec Nicolas KAPLYN et Pierre AZÉMA
5 représentations exceptionnelles :
- Samedi 11 Octobre à 20h et Dimanche 12 Octobre à 17h à L’Espace Sorano (Vincennes)
- Mardi 14 Octobre à 20h à La Salle André Malraux (Sarcelles) – 29 rue TaillepiedTél : 01 39 33 51 59 (salle) 01 34 38 20 51
billetterie sur place du mardi au vendredi de 10 h à 12 h / de 14 h à 17 h et lors des spectacles ou par mail : ocm@sarcelles.fr
- Mercredi 19 et Jeudi 20 Novembre à 20h45 au Petit Theatre de L’Athénée (Rueil Malmaison)
Nous aurons ensuite l’immense plaisir de retrouver cette pépite au Festival Off d’Avignon 2026 mais je vous en reparlerai d’ici là!
